Phoenix Wright

J'étais cette année en PACES pour la seconde fois consécutive. J'avais décidé de bosser sans relâche pour arriver à la sainte 2e année de médecine et pour y arriver, j'ai fait pas mal de concessions. J'ai par exemple passé tout mon été à bosser mes cours de l'année passée pour rattraper mon retard et de travailler jusqu'à épuisement si nécessaire pour ne plus avoir de retard sur l'année en cours (ce qui m'a parfois amené à faire du 6H-1H), en excluant toute sortie avec amis et famille pour gagner un maximum de temps. Sur conseil de ma prépa de première année pas mal axée cours, j'ai pris une prépa exclusivement axée exercices (ce qui m'avait fait défaut en première année) et gardé mes cours de prépa de l'année dernière. Au retrait des poly en début d'année j'ai fait le constat que la totalité des cours étaient exactement pareils que ceux de l'année passée (même nombre d'heures de cours, mêmes poly à la page près, même contenu des cours...), et devant la qualité médiocre des cours de l'année (les profs étaient vraiment mauvais), j'ai décidé de reprendre mes cours de prépa et de travailler uniquement de chez moi et avec la prépa, en suivant le schéma du cours de la fac à partir des évènements tragiques de novembre (avec ce qu'il se passait ça donnait plus vraiment envie d'aller sur Paris). Cela me permettait également de gagner 3 heures de transport par jour la plupart du temps, ce qui m'a permis de me préparer encore plus sur l'aspect exos type concours. Cependant en fin de semestre un dernier chapitre dont je n'ai pas eu connaissance a été abordé dans certaines matières et avait la particularité de pouvoir être lié à tous les autres gros chapitres de l'année , les poly ont été distribués le jour même du cours et mon "ami" qui était au lycée avec moi et est venu avec moi en médecine a bien entendu oublié de me le dire (il m'avait déjà fait des crasses en première 1ere année mais s'était excusé et j'ai fait la bêtise de penser qu'il était de nouveau honnête avec moi). C'est ainsi que je me suis royalement planté le jour du concours, encore plus que la première fois niveau notes (mais j'ai fini mieux classé, le concours était visiblement plus dur), car bien entendu tout le concours tournait autour de ces "nouveautés".

Après autant de travail inutile, gros choc émotionnel, j'étais comme une coquille vide. Je ne dormais plus (environ 3/4 heures par nuit, et j'arrivais parfois à me réveiller en plein milieu), je mangeais très peu (j'ai perdu 7 kg en 3 semaines), je ne sortais plus et passais mes journées dans mon lit, à rien faire de spécial. Je savais vraiment plus quoi faire, j'ai jamais été confronté à l’échec avant ces 2 années, la première année je m'en suis remis difficilement en me disant que j'avais encore la deuxième année pour tout donner, mais là j’avais plus rien. Depuis que je suis gamin j'ai toujours su que je voulais bosser dans la médecine, et vu mon parcours scolaire je me suis toujours dit que j'en avais les capacités, donc me suis donc jamais vraiment posé la question à propos d'un plan B, et même en médecine je préférais ne pas trop y penser pour rester focus sur les études. Mes parents m'ont forcé le repos pendant ces 3 semaines, "sans penser à tout ça" (ce qui était évidemment impossible). J'avais pris l'habitude de ne plus sortir du tout et c'est à ce moment que j'ai ressenti toute la solitude que j'avais créé.

Suite à cette période j'ai décidé que je ne continuerais pas cette orientation qui était de toute façon perdue d'avance et qui m'avait déjà fait beaucoup trop craquer. Et je me suis lancé dans la recherche d'une autre orientation. C'était long et plus compliqué que ce que je pensais, la médecine m'a laissé quelques séquelles qui ne voulaient pas se refermer : quoi que je regardais, je me disais que les études étaient trop longues, ou que c'était trop compliqué pour moi et que je n'y arriverais pas, que c'était hors de question de tenter telle formation parce qu'elle débouchait sur un concours de passage etc... les métiers me paraissaient trop compliqués, pas assez demandés ou pas assez intéressants. J'ai fini par cibler une réorientation dans l'informatique après pas mal de recherches sur le net, dans des CIO et en me renseignant auprès de personnes qui sont dedans etc... mais toute personne non titulaire d'un bac de l'année en cours est non prioritaire, du coup j'ai moins de chances d'obtenir ce que j'ai demandé (réponse le 8 juin visiblement, via mon vieil ami APB). En parallèle je passais une grosse partie de mes journées à dormir et je jouais énormément aux jeux vidéos. Ça a duré quasiment 2 mois et demi, c'était vraiment pas beaucoup mieux et je le savais.

C'est alors que j'ai décidé de me reprendre en main, j'ai commencé à sortir énormément pour aller voir ma famille et de plus en plus mes amis, trouvé un travail pour cet été, enfin trouvé la force de chercher les papiers pour envoyer mon PC fixe en réparations (et c'était pas gagné, j'ai mis 3 semaines avant qu'ils acceptent de le reprendre, et je suis en train de galérer pour qu'ils me le rendent ><), trouvé/confirmé ma nouvelle orientation et fait le nécessaire niveau paperasse/APB... bref ça commençais à aller mieux mais je pouvais pas m'empêcher de penser à la deuxième partie des concours fin mai, ça me mettais assez mal à l'aise parce que j'ai jamais vraiment séché les cours et abandonné des études comme je l'ai fait, et j’appréhendais le fait d'y aller et de rien savoir faire le jour J. Mes parents ont alors trouvé une solution radicale : pas y aller et partir en vacances à cette période là. Ça m'a étonné de leur part, eux qui m'ont toujours rabâché que les études c'était ultra important et qu'il fallait être sérieux m'ont beaucoup soutenu cette fois-ci. Mais du coup je suis bien partit en vacances et le concours passé j'ai plus vraiment de stress venant des études.
Du coup actuellement j'ai un rythme de vie à nouveau normal, je me suis remis à regarder des séries et anime petit à petit tout en continuant à jouer aux jeux vidéos de façon modérée, avec des sorties le plus souvent possible. Je me sens un peu revenu à l'ère fin lycée et ça fait du bien.

Désolée pour ce qui t'est arrivé avec ton ""ami"", Feeka, franchement c'est pas classe.
Au final, j'ai quand même l'impression que beaucoup ressortent de médecine avec ce genre de sentiments : la déprime, la sensation de vide, le doute, et les conséquences de ces conditions déplorables et presque inhumaines je dirais, avec les "amitiés" qui explosent parce que les gens révèlent leur vraie nature dans cette ambiance de concours. Mais ce qui t'est arrivé est quand même dégueulasse... Au moins on ne t'y reprendra plus avec ce type à présent.

Je te félicite quand même grandement d'une chose (en particulier, parmi toutes les autres). C'est d'avoir eu le courage et la clairvoyance de "laisser tomber" alors même qu'il te restait le concours de fin d'année. C'est d'ailleurs quelque chose que je n'ai moi-même pas eu (même si les circonstances étaient un peu différentes) et qui ne doivent pas être très courantes, surtout après deux ans d'effort.
D'ailleurs c'est vraiment bien que tes parents t'aient apporté leur soutien sur ce point !

Donc voilà, je te dis bonne chance pour ta nouvelle orientation - chouette en plus car de souvenir, tu te posais déjà la question de l'informatique il y a un moment - , et te souhaite de t'accrocher car ce n'est pas chose évidente que de changer de direction, surtout quand la première option était une vocation depuis longtemps ! En tout cas c'est le meilleur moment pour être le plus à l'écoute possible de ce que tu veux TOI, ce qui t'intéresse et que tu as envie de faire, surtout que ça coule pas de source, et nécessite parfois (souvent, voire toujours ?) plusieurs essais pour tester les différentes directions possibles.

Dis-toi que ça n'est pas des années perdues. Fais-toi une rétrospective de ces deux ans (que tu as déjà commencé apparemment), c'est ce bilan qui t'aidera à te guider par la suite. Pas dans le sens "ce que j'aurais dû faire ou pas" ou "ce que j'ai mal fait", plutôt une analyse de ce qu'il s'est passé, pendant, voire avant, pour déterminer "l'après" (c'est presque de la philo ce que j'écris ! XD).
Ces conditions "particulières" te permettent de te questionner sur ce qui t'a amené vers cette voie, tes motivations (on en a souvent plusieurs), ce qui te plaît ou pas, et comprendre ce qui te va aussi humainement au niveau de la façon de travailler (d'étudier), etc.
Parfois, ce qui plaît dans une orientation ou un métier, surtout médecine ou équivalents - et là je parle de façon très générale, donc pas forcément ce qui te concerne toi, toi seul peut le savoir -, ça peut être diverses choses. L'image qu'on a du métier. La fierté d'avoir fait de grandes études, d'avoir "réussi" dans ce que la société considère comme étant la réussite. La motivation d'aider les autres, les gens, d'être utile, de sauver des vies ou d'en améliorer la qualité. Le contact avec autrui, dans tous les sens du terme d'ailleurs. Parfois, on s'engage dans cette voie un peu par hasard, parce qu'il faut aller quelque part, ou qu'on y est attiré sans trop savoir à quoi on s'engage. Et dans d'autres cas c'est pour faire plaisir aux parents (et/ou à soi-même), ou bien pour une reconnaissance. Ou alors, on aime le domaine étudié, même si le métier à la clé est pas forcément celui dans lequel on se voit ! Il y a aussi le salaire au bout... L'envie de travailler solo, ou à l'inverse en équipe. Le temps libre que ça laisse pour sa vie personnelle (ou pas...). Et la sécurité de l'emploi. Etc, etc, etc.

Bref, y'a souvent un mélange de tout ça ou au moins de quelques facteurs (bien sûr il y en a beaucoup d'autres que je n'ai pas cité et qui ne sont pas dans cette liste), et l'important c'est de déterminer quoi. Tu peux te poser la question, il y a aussi des tests de personnalité qui aident à en comprendre plus sur soi-même que ce qu'on voit en nous au premier abord par rapport à ce qui nous motive vraiment : les choses importantes pour nous, voire les classer en priorités lorsqu'on hésite entre des options radicalement différentes.

Tout ceci parce qu'il y a beaucoup de métiers où tu pourras retrouver ce qui t'a motivé, même si ça ne sera pas tout à fait pareil, parfois ça peut même être mieux (meilleures conditions de travail par exemple).
Bien te connaître permet aussi de déterminer, dans les facteurs qui t'ont motivé, ce qui n'est finalement pas si important que ça, ou qui te paraît un peu "biaisé" (exemple : une reconnaissance sociale) ou que tu peux obtenir autrement (la vie ne se résume pas au travail ! C'est une habile répartition entre ce que tu auras au travail et ce que tu auras dans ta vie personnelle/loisirs, comme par exemple un domaine qui te passionne mais qui n'a aucune sécurité de l'emploi, et que tu peux décider du coup, pour garder la satisfaction que ça te procure, de le placer comme "loisirs" simplement et non métier... ou non ! ll n'y a pas de mauvais choix, car on est tous différents : à nous de bien nous connaître).


.... BREF *s'égare* l'important dans l'histoire c'est de savoir que chaque expérience, aussi mauvaise soit-elle (et elle l'est rarement du début à la fin sans interruption d'ailleurs), reste une expérience, permettant d'en tirer quelque chose ! Et à ce que je vois, pour que tu redémarres ainsi après tout ça, remettant ta vie personnelle et tes proches sur le premier plan, contrastant au max avec la PACES, et que tu ne te laisses pas abattre après ce que certains appelleront "un échec" et que d'autres appelleront "une chance", c'est que tu as vraiment tout compris. 

Bonne continuation comme on dit, et bon retour parmi nous !